« Pour la première fois, on ne voyait plus seulement des figures de rêve sur papier glacé, mais des femmes, les cheveux en bataille, surprises dans leur cuisine, un enfant dans les bras », relate Janine Niépce dans son ouvrage Les Années Femmes, paru en 1993. Des portraits de femmes, la photographe appartenant au courant humaniste de la photographie d’après-guerre en a capturé des centaines au cours de sa carrière. Du 3 octobre 2024 au 5 janvier 2025, dans le cadre de sa saison 2024/2025 dédiée au travail, la Cité de l’Économie met les clichés de l’artiste, et plus particulièrement sa vision du rapport entre les femmes et le monde du travail, à l’honneur grâce à une exposition en trois parties intitulée Janine Niépce, regard sur les femmes et le travail.
©Janine Niépce / Roger-Viollet
Photographier toutes les formes de travail
Dans ce cadre singulier et chargé d'histoire qu'est la Cité de l'Économie, les nuances de noir, de blanc et de gris des photographies s'inscrivent à merveille. S'ouvrir à une dimension plus artistique, telle est la volonté de ce lieu au travers de cette première exposition photographique. Des étudiant·es, des enfants, des manifestant·es, des agriculteur·ices, des salarié·es à l'œuvre… la photographie de Janine Niépce se démarque par son caractère particulièrement direct et authentique, laissant au modèle humain une place centrale.
Durant la seconde partie du XXe siècle, ses modèles, ce sont les femmes. L’artiste s’immisce dans la sphère privée comme professionnelle pour livrer le portrait le plus juste et représentatif de la société et de la condition des femmes entre les années 50 et le début des années 2000. Dans le foyer comme à l'extérieur, elle s'atelle à montrer le travail quotidien des femmes, à une époque où le salariat ne leur était pas ou peu autorisé. « Les hommes avaient l’habitude de photographier de belles femmes, posant pour des modèles de haute couture, mais rarement en train de faire la lessive ! », écrit d’ailleurs la photographe. Rares sont les fois où elle demandait à ses modèles de poser. La photographie sur le vif était privilégiée ; « au fil de la journée les gens l'oubliaient et elle arrivait à capturer ces moments uniques », explique Hélène Jaeger Defaix, petite-fille de la photographe.
Documenter la liberté des femmes
De l’émancipation féminine, Janine Niépce en documente l’avant, le pendant et l’après, appareil photo Leica à la main. Ses moments de prédilection ? « L’égalité salariale entre femmes et hommes, la contraception, l’accès à l’avortement, le planning familial, l’ouverture de certaines filières d’études ou de certains métiers jusqu’alors exclusivement masculins…», témoigne Hélène Jaeger Defaix. Elle-même photographe femme, travaillant dans une discipline majoritairement dédiée aux hommes, Janine Niépce est confrontée à de nombreuses injustices et est aux premières loges pour mettre en lumière les changements drastiques qui s’opèrent dans la vie de ses consœurs.
©Janine Niépce / Roger-Viollet
Sans montrer le choquant, elle s'attaque à mettre la réalité en lumière pour témoigner, alerter, mais aussi « ouvrir un champ des possibilités pour les petites filles, qu'elle-même s'interdisait jusqu'alors », ajoute la petite-fille de la photographe. De la mère au foyer à l’avocate, l’institutrice, la sage-femme, la technicienne de maintenance, la cheffe de chantier ou l'œnologue, la photographe utilise son art pour raconter l’histoire : celle de « l’indépendance financière et donc de la liberté des femmes », conclut Hélène Jaeger Defaix.
Janine Niépce, regard sur les femmes et le travail
Cité de l’Économie - Hall Defrasse
1, place du Général-Catroux – 17e
Du 3 octobre au 5 janvier 2025
Du mardi au dimanche de 14h à 18h
Jusqu’à 19h le samedi
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