Si vous avez toujours rêvé de vous mettre dans la peau d’un espion et de percer les secrets des gouvernements, c’est possible sur Leboncoin ! Non, vous n’avez pas à poster une annonce pour vous faire recruter par les services secrets russes, ce sont eux qui viennent jusqu’à vous !
Une stratégie de recrutement pas comme les autres
Des Français ont été approchés par des agents des services secrets de Moscou par le biais du site de petites annonces, selon une source du ministère de l’Intérieur, rapporte le journal Le Monde. Un jeune ingénieur récemment embauché dans une grande société française de technologie civilo-militaire spécialisée dans l’intelligence artificielle a ainsi été contacté par un consultant de nationalité tchèque pour ses cours de mathématiques sur le site Leboncoin.fr. Une fois toutes les trois semaines, il lui donnait des cours lors de dîners au restaurant.
L’élève était en réalité un agent des renseignements russes (SVR, issu de l’ex-KGB) chargé des questions scientifiques et technologiques à la mission économique de son ambassade à Paris. En novembre 2020, cet espion nommé Valentin Vladimirovitch Zakharov, a été expulsé après avoir été pris en flagrant délit alors qu’il remettait de l’argent liquide au jeune ingénieur contre des documents d’analyse sur des technologies de pointe.
Cette démarche de recrutement met en lumière une nouvelle pratique de l’espionnage russe en France. Selon une source du ministère de l’Intérieur, « une douzaine d’approches de ressortissants français sur des sites type Leboncoin.fr par des officiers traitants du SVR » ont été recensées ces dernières années. Les espions de Moscou ont ciblé, à chaque fois, des « profils tendres mais à haut potentiel », des étudiants, des diplômés de grandes écoles ou de jeunes professionnels.
Difficile de découvrir le pot aux roses
Après quelques cours de mathématiques, Zakharov a proposé au jeune ingénieur d’augmenter sa rémunération contre des rapports et des documents sur des recherches scientifiques dans certains domaines technologiques de pointe. Au début, le jeune débutant plein d’avenir ne voit pas le problème puisque la contrepartie est justifiée par les soi-disant prospections faites en France par le cabinet de conseil de son "élève". Et pourtant, le but était en fait de tester sa réceptivité à des sollicitations sortant du strict cadre des cours. Les premiers doutes sont apparus lorsque Valentin Zakharov a insisté pour obtenir des informations sensibles directement liées à son travail.
D’après les éléments recueillis par Le Monde, les autorités françaises estiment à près de 75 le nombre d’agents secrets russes agissant sous fausse qualité diplomatique, ce qui leur permet de bénéficier de l’immunité s’ils se font arrêter. Pour le SVR, la naïveté, la faible expérience et l’ignorance des méthodes d’espionnage russes sont un atout pour les exploiter. En soutirant à la source des informations confidentielles et sensibles liées à son domaine d’expertise, les officiers expérimentés peuvent sans difficulté accéder au cercle professionnel et personnel de leur cible. D’après Le Monde, la DGSI a usé de méthodes plus ou moins douces en fonction des affaires. Si, dans certains cas, l’agent du SVR a été invité à quitter le territoire, d'autres ont eu droit à des mises en garde discrètement transmises sous couverture diplomatique.