Avenue de Saint-Ouen, avenue de Clichy, on a connu plus calmes comme endroits, on est d’accord. Aventurez-vous donc hors des sentiers battus, grimpez une petite pente et vous voilà arrivés devant l’intriguante Villa des Arts. A gauche, la galerie, à droite, les grandes portes du paradis, et j’exagère à peine. Cette cité d’artistes du XIXe siècle n’a pas bougé d’un poil (de pinceau) et ça, ce n’est que la partie visible de cette pépite planquée à flanc de butte. « Attention à la marche et bienvenue chez nous », préviennent Brigitte et Dorothée, nos guides du jour.
Elles sont aussi excitées de me faire la visite que moi d’arpenter cette villa méconnue du 18e. Les deux bénévoles de l’association La Ville a des Arts, qui préserve le site, me racontent son histoire dans le jardin, assises sur de grands bancs en bois. Le calme de la cour est troublant : Paris ou côte bretonne, on ne sait plus vraiment où on est…
Le dépaysement continue à l’intérieur : « Entée des artistes », des lettres rouges floquées sur la porte pour un film de Marcel Bluval dans les 80’s, annoncent la couleur. Derrière, un immeuble d’époque insoupçonné : des mosaïques par terre aux couleurs des peintures en passant par les grandes portes rouges et les vitraux, tout a été restauré comme à l’époque (1889).
On doit cette prouesse au collectif d’artistes installés ici depuis des décennies. Ils ont tout mis en œuvre pour préserver les 6190 m2 d’espace de création d’un méchant promoteur immobilier. Résultat, en 2007, la Mairie de Paris acquiert le site, d’ailleurs déjà inscrit à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1994.
Brigitte, artiste elle aussi, développe : « il ne faut pas oublier que la Villa est avant tout une œuvre philanthropique de l’architecte Henri Cambon, réalisée avec des matériaux de récup’ de l’Expo Universelle de 1889 ». Ça vous dit quelque chose ? C’est bien. C’est effectivement l’année de naissance de notre chère tour Eiffel. Des arcs-boutans de la Dame de Fer servent donc de décoration et de soutien dans le couloir du haut. Je ne sais pas pour vous mais éviter de faire deux heures de queue pour regarder de près les superbes ferronneries d’un des plus cool monuments du monde, c’est quand même agréable non ?
A en croire les célèbres fantômes qui hantent peut-être les lieux de leur génie, nous ne sommes pas les seuls à trouver ça bien. Renoir, Picasso, Cézanne, Marcoussis ont emprunté avant nous ce magnifique escalier, ouvert ces portes, créé et probablement refait le monde dans les ateliers de 4 à 7 m de hauteur de plafond…
Ces 47 spacieux cabinets de création inondés de lumière grâce à plusieurs cours et verrières géantes côtoient 36 logements sociaux. Un melting pot qui fait de la Villa des Arts un lieu insolite en plus d’être une pépite architecturale qui a traversé les âges. Pour ça et tout le reste qu’il est difficile de mentionner de manière exhaustive ici, je déménage demain.
En attendant et puisqu'il le faut, je me tourne une dernière fois avant de partir pour contempler le fabuleux, que dis-je, le splendide escalier conçu hors les murs pour être finalement posé dans son écrin éternel, intimement caché dans cette villa labyrinthique aux mille et une histoires…
Venez toutes les découvrir lors des visites organisées pour la Fête des Vendanges
13 et 14 octobre
Villa des Arts
15, rue Hégésippe-Moreau - 18e