Le Bonbon

Gros sujet de tension : la polémique barbecue et virilité

Ce week-end, Sandrine Rousseau a tenu des propos sur la consommation de viande qui en ont agacé plus d’un. Mais pourquoi la femme politique d’Europe Écologie Les Verts s’attire-t-elle systématiquement les foudres de l’opinion publique française ? Retour sur un scandale médiatique parti de presque rien.

Après un été dévastateur, l’écologie semble être la préoccupation : on commence enfin à se demander à quoi ressemblera notre futur. Faut-il continuer d'habiter les milieux urbanisés ? Les questionnements se succèdent : quelle mode de consommation adopter ? comment s’alimenter ? Pourtant dans le même temps, Kylie Jenner prend son jet privé pour un trajet de 12 minutes, le président Macron se fait photographier en jet-ski pour nous parler quelques jours plus tard de la fin de l’abondance, et les stars d'Hollywood explosent leur budget d’eau dans les collines asséchées de Californie…


La naissance de la polémique

C'est dans ce contexte que Sandrine Rousseau a provoqué malgré elle une nouvelle polémique, en liant de manière indissociable consommation de viande et virilité. Ce samedi 27 août, la femme politique a déclaré pendant une table ronde des journées d’été d’Europe Écologie Les Verts : « Il faut changer de mentalité pour que manger une entrecôte cuite sur un barbecue ne soit plus un symbole de virilité ». La classe politique française dans son ensemble s’est empressée de réagir à ces propos, notamment la gauche, puisque Fabien Roussel a répondu que « on mange de la viande en fonction de ce que l’on a dans le porte-monnaie, et pas en fonction de ce qu’on a dans sa culotte ou dans son slip ». 

Pas faux, mais pas totalement vrai non plus, surtout quand on jette un œil aux chiffres.


Une assiette bel et bien genrée

D’après l’enquête INCA 3 de l’ANSES (Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale), un homme consommerait 43 grammes de viande hors volaille par jour contre 27 grammes pour une femme. La consommation des hommes serait en moyenne 40 % plus polluante que l’alimentation des femmes. Il existe donc bel et bien un décalage genré dans l’alimentation, même si on ne peut évidemment pas exclure le décalage social dont parle Fabien Roussel. Dans l’ouvrage Steaksisme (Éditions Nouriturfu), Nora Bouazzouni explique que les assiettes riches notamment en viande, sont considérées comme plus "masculines", et qu'en revanche, les assiettes hypocaloriques et plus légères sont considérées comme "féminines". On se rappelle alors de ce cousin ou de ce frère dont on surchargeait l’assiette à l'adolescence sous prétexte qu’il était en pleine croissance. Et tout se joue à ce moment-là ! Pendant qu’on crée une injonction au régime et à « faire attention » pour les jeunes femmes, on crée celle de trop se nourrir pour les jeunes hommes. Mais la vraie question qui se pose, c’est pourquoi reconnaître l'existence de cette tendance est aussi irritant pour certains ? Pour certain.e.s, c’est encore une fois parce qu’il s’agit d’une problématique éco-féministe, qui demande une réponse éco-féministe.


L’éco-féminisme, un courant de pensée qui fâche

Qu’est-ce que l’éco-féminisme, que Sandrine Rousseau et d’autres sollicitent pour répondre aux problématiques actuelles ? D’après la philosophe et spécialiste du sujet Jeanne Burgart Goutal, « la thèse fondamentale de l’éco-féminisme, c’est de soutenir qu’il y a des liens indissociables entre domination des femmes et domination de la nature, ou entre capitalisme écocide et patriarcat », comme elle l'expliquait au média Slate. Voilà donc où se situe le problème, au-delà du mythe de la masculinité en danger. La tension se logerait-elle pile au bout du doigt féminin "accusateur", qui ne supportera plus aucune domination croisée, ou plutôt dans le regard et l’égo de celui qui est accusé ?