Le Bonbon

Noël aux Halles, une fête populaire pour sortir les personnes âgées de l’isolement

Depuis 1945, Noël aux Halles permet de rassembler bénévoles et personnes âgées, « jeunes et vieux », le 24 décembre autour d’un événement solidaire dans le centre de Paris. Pour Dorothée Simon et Danielle Pourtier, membres de l’association depuis des décennies, cette soirée s’est profondément transformée, reflet d’une période moins insouciante et du manque de ressources accordées à ce type de groupement. Pour autant, les deux amies ne la manqueraient pour rien au monde.

Noël, c’est avant tout une affaire de partage. Si pour certain·es, cette tradition rime avec famille et intimité, pour d’autres, elle n’a de sens qu’en réunissant des inconnus qui n’ont personne avec qui la fêter. Parmi les plus isolées de la société, les personnes âgées. Selon un sondage IFOP, en 202016% de cette population passait Noël seule en France, soit 2,2 millions de personnes

Heureusement, il existe des initiatives à l’échelle locale qui tentent de recréer du lien et de rapprocher nos ancien·nes : c’est le cas de Noël aux Halles, une association indépendante de toute affiliation politique et confessionnelle qui organise chaque 24 décembre un repas à destination des personnes âgées des 1er, 2e et 3e arrondissements de Paris. 


Pérenniser la fraternité à travers les époques 

Tout commence au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans un Paris qui se remet doucement de l’Occupation. À l’initiative de Michel Minart, fondateur, aidé d’un groupe de scouts, l’association naît afin de rassembler les générations et d’apporter nourriture et chaleur humaine aux habitant·es du quartier des Halles, très populaire à l’époque, loin des aménagements modernes qu’on lui connaît aujourd’hui. Danielle Pourtier — que tout le monde appelle Dany — est sûrement la plus ancienne bénévole de l’association, puisqu’elle commence à participer aux repas à l’âge de 9 ans pour accompagner ses parents, eux aussi membres. « À l’époque, ce n’était pas le gueuleton de Noël qu’on connaît aujourd’hui. On servait de la soupe à environ 800 personnes avec un objectif de fraternité que nous n'avons jamais vraiment perdu de vu », explique l’actuelle secrétaire générale de l’association.


© Noël aux Halles 

Si les valeurs de l’événement sont restées intactes, sa forme, elle, s’est transformée à travers lieux et années. La grande soupe offerte à toutes et tous, qui mélangeait aîné·es et personnes sans domicile fixe, s’est peu à peu mutée en un dîner-cabaret organisé dans la grande rotonde de la Bourse du commerce (1er), le tout avec le soutien de partenaires, dont l’association Les Petits Frères des Pauvres. À l’évocation de cette époque, un large sourire nostalgique se dessine sur les visages de Dany et Dorothée Simon, membres du conseil d'administration depuis une vingtaine d'années. « C’était une superbe fête », s’enthousiasme la première ; un « grand show », acquiesce la seconde. Plus de 200 bénévoles et 600 invité·es se réunissaient à l’occasion d’un repas festif ponctué de concerts et animations. « C’était une fourmilière, chacun avait son rôle, entre la plonge, la cuisine… On fonctionnait comme un grand restaurant », se souvient Dorothée.


Un grand goûter convivial « qui convient très bien »  

Parce que voilà, en 2014, la Bourse du Commerce ferme pour devenir un musée, il faut alors trouver un autre lieu où crécher. Salles qui coûtent « bonbon », adresse Dorothée d’un clin œil complice, dispositif de sécurité trop contraignant : depuis plusieurs années, c'est l'Oratoire du Louvre qui accueille le repas, en attendant d'investir un espace plus vaste pour retrouver la capacité d’antan

Si les effectifs sont réduits, hors de question de rendre le 24 décembre moins festif pour les personnes âgées. Désormais, on ne parle plus de soirée mais de goûter gourmet et musical, mis en place par une cinquantaine de bénévoles. La fierté de l’asso’, c’est sûrement la présence fidèle de Madlyn Dugué, une accordéoniste de 15 ans « qui est déjà une star », s’exclame Dorothée. En plus de l’air enchanteur qui emplit le lieu, champagne, petits fours sucrés et salés, calendriers et cadeaux surprises sont à la disposition des seniors, pas moins gourmands que les autres. De fait, « le goûter convient très bien, ils s’en accommodent puisqu’ils peuvent rentrer avant la nuit, c’est moins stressant ».


© Noël aux Halles 

Cette année, entre 100 et 150 personnes sont attendues, d’une moyenne d’âge de 80 ans ; des nouvelles venues et une ribambelle d'habitué·es que Dany « connaît par cœur ». « Beaucoup ont peur de venir. Dès qu’on les a sur notre liste, notre rôle, c’est de se déplacer chez eux, de discuter avec eux. Un vrai travail de visites est assuré en amont par de nombreux bénévoles. » Pour celles et ceux qui sont trop fatigué·es, elle prête main forte et participe à la distribution de colis à domicile

Si vous connaissez un·e aîné·e du centre de Paris qui a prévu de passer le réveiller de Noël en solitaire, envoyez un mail à contact@noelauxhalles.org, chaque participant·e doit être enregistré·e au préalable. Si vous-même n'avez rien de prévu le jour j, il est toujours possible de devenir bénévole et de passer votre "Noël aux Halles", entouré·e de personnes âgées avec des milliers d'histoires à raconter.  


Noël aux Halles
Le 24 décembre 2023 à l'Oratoire du Louvre
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