« Du poison dans le poisson ! » C’est le slogan assez dramatique mis en avant par les associations Bloom et Foodwatch dans un tout nouveau rapport publié ce jour. Après avoir analysé près de 150 boîtes de thon venues de 5 pays d’Europe, le constat dressé est sans appel : ces conserves sont très (trop) largement contaminées au mercure, une substance extrêmement nocive pour la santé humaine. Mais alors que se passe-t-il exactement ?
Le thon, petit chanceux des réglementations
Pour réaliser cette enquête gigantesque, l'association Bloom a prélevé au hasard 148 boîtes de thon de marques différentes, venues de 15 supermarchés répartis dans 5 pays européens : la France, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Espagne et l’Italie. Les conserves ont ensuite été analysées par un laboratoire indépendant assez catégorique : 100% des échantillons testés étaient positifs au mercure.
Mais alors comment expliquer cette surreprésentation de méthylmercure (une forme de mercure retrouvée dans les océans) dans le poisson ? Cela est dû à une tolérance assez inquiétante de ce poison dans le monde thonier. En effet, si, pour la plupart des poissons, le seuil maximum autorisé est de 0,3 mg/kg, pour le thon, ce dernier est trois fois plus important et passe à 1 mg/kg. Une différence qui, selon Bloom, s’explique principalement par des enjeux économiques imposés par le lobby du thon.
En effet, toujours selon l’étude récente, aucune analyse médicale ou humaine n’a été prise en compte lorsqu’il a été question de fixer cette limite. Une quantité qui, si elle cause des risques supplémentaires pour la santé, permet en revanche la vente de 95% des thons pêchés dans le monde. Car ces poissons se trouvant plutôt en haut de la chaîne alimentaire, ils ont tendance à être plus contaminés de base. L’espadon et le requin bénéficient de la même dérogation, sans doute pour les mêmes raisons. Ils sont cependant beaucoup moins consommés.
Quelles conséquences pour l’organisme ?
Dernière raison derrière ces chiffres alarmants détectés : le taux maximum est fixé par rapport au produit frais et non sur sa version transformée. Or lorsque le thon est déshydraté pour être mis en boîte, le taux de mercure se concentre alors pour devenir encore plus important. C’est sans doute ce qui explique que 100% des boîtes soient positives, 57% au-dessus des 0,3 mg/kg imposés aux autres poissons, et une sur 10 au-dessus du 1 mg/kg légal !
Lors de ces analyses, le laboratoire a même trouvé une boîte au taux absolument catastrophique : 3,9 mg/kg, soit près de 4 fois la limite, et 13 fois ce qu’on retrouve dans une boîte de sardines, par exemple. Et comme on est des petits chanceux, il s’agissait d’une boîte de la marque Petit Navire, achetée dans un supermarché Carrefour, en France. Seulement voilà, ce n’est pas parce que le mercure est ingéré dans du thon plutôt qu’autre chose qu’il est moins dangereux pour la santé !
Même sur le court terme, une consommation trop importante de mercure peut entraîner des troubles cognitifs, des troubles cardiovasculaires, de l’anxiété, et même des cancers du foie. Et chez les enfants, le résultat est encore pire, puisqu’il peut endommager le cerveau, et donc provoquer de graves troubles neurocomportementaux, entre autres. L’association exige donc que des contrôles beaucoup plus sévères soient mis en place, et que le taux autorisé baisse d’urgence. En attendant, on se rabat donc sur le maquereau les copains. Et puis c’est délicieux le maquereau !